UN INSTANT DE VIE PARTAGE.

Un après-midi d'été banal. Je m'installe en terrasse et commande un café.
Je vois...

Je vois des familles qui dégustent des glaces sous la chaleur de ce mois de Juillet. Les parents discutent alors que les enfants se chamaillent sur la taille de leurs boules.
Je vois des bandes d'amis venus déjeuner ensemble. Ils refont le monde sans se soucier du lendemain.
Je vois des touristes s'échangeant leurs découvertes du jour dans différentes langues et prenant des photos de tout ce qu'ils voient, comme si leur objectif était un troisième œil.
Je vois des couples. Couples en devenir à leur premier rendez-vous, des jeunes couples encore amoureux se tenant le main, et ceux qui sont déjà sur la fin en pleine dispute.
Je vois un manège. Les enfants qui supplient leurs parents pour une instant de pur bonheur. Je vois leur insouciance, leur innocence dans leurs yeux qui brillent d’émerveillement lorsque le carrousel se met en marche. 

Un café, une cigarette et un crayon. Je les observe et j'écris. J'écris ce moment. Je leur vole cet instant de leur vie par plaisir en toute simplicité. Je les observe et je me demande...
Qui sont ces gens? D'où viennent-ils? Quelle vie mènent-ils? Quels drames cachent-ils derrière ces masques? Tant de gens qui vivent ce moment sans savoir qu'on pense a eux.

Et le garçon qui passe de table en table en apportant glaces et cafés. Qu'en est-il de sa vie à lui? Je le vois le soir venu se reposer de cette journée avec ses propres amis sur cette même terrasse. Ou peut-être avec une jolie fiancée? Je le vois rentrer chez lui directement après son service pour retrouver un vieil appartement lugubre où il s'injecte la totalité de son petit salaire dans les veines. Qui peut savoir ce qui se passe vraiment derrière le sourire qu'il affiche devant ses clients?

Tant de raisons différentes à une même présence en un même lieu.

Je termine mon café, écrase ma cigarette et ferme les yeux un instant. 
J'entends les cris de joie des enfants, les disputes d'un couple, les rires des amis. Je savoure la sensation du Soleil sur mon visage. 
J'entends un grondement, un crissement de pneus, un fracas, des cris, puis le silence. 
Le Soleil a disparu. Je ne le sens plus. Je vois une agitation, mais je n'entends plus. Je m'élève...

Je vois les enfants du sortir du manège les yeux cachés par les mains de leurs parents. Je vois quelques personnes venir en aide à leurs amis blessés. J'en vois certaines allongées sans bouger alors que d'autres sont en pleurs.
Tous se sont arrêtés là, à ce même moment partagé. Certains avec la même mort.

Pourquoi ici? Pourquoi maintenant?
Des passants appellent les secours alors que d'autres ne font que regarder, sous le choc. Ca aurait pu être eux.
Qu'en est-il des absents? Des amis, des familles, des parents des touristes à l'autre bout du monde qui ignorent que leur enfant ne rentrera pas?

Deux agents de police sonnent à la porte. Une femme en fauteuil se présente. Elle a le teint pâle et la tête chauve. A l'annonce de la nouvelle les larmes coulent sur ses joues. Elle porte une main à sa bouche. Je vois les mêmes doigts que ceux qui ont posé mon dernier café face à moi.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire